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Ammeux-Roubinet, Henriette
Dent de lait
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A New York City, Sam se sent tout petit Quand il regarde en l'air, pour voir un peu de bleu, il se cogne les yeux contre le béton et le verre des gratte-ciel, plantés serrés comme des arbres dans la forêt.
Corinne Albaut
Mais à quoi jouent les crayons Pendant les récréations ? Le rouge dessine une souris , Le vert un soleil , Le bleu dessine un radis , Le gris une groseille. Le noir qui n'a pas d'idée , Fait de gros pâtés. Voilâ les jeux des crayons Pendant les récréations.
Corinne Albaut
Deux
sorcières en colère
Se
battaient pour un balai
C’est
le mien, dit la première,
Je le
reconnais !
Pas du
tout, répondit l’autre,
Ce
balai n’est pas le votre,
C’est
mon balai préféré,
Il est
en poils de sanglier,
Et je
tiens à le garder !
Le
balai en eut assez,
Alors
soudain il s’envola
Et les
deux sorcières
Restèrent
Plantées
là !
Corinne Albaut
Chat chat chatte Pierre Albert-Birot,
Complainte amoureuse
Oui dès l'instant que je vous vis
La lune en maraude au coeur des vergers Grimpait aux pommiers en jupon d'argent ; Surgirent des chiens rauques, déchaînés : La lune s'enfuit, laissant un enfant.
Il vint avec nous en classe au village, Tout à fait semblable aux autres garçons Sauf cette clarté nimbant son visage Sous le feu de joie de ses cheveux blonds.
Il aimait la pluie, les sources, les marbres, Tout ce qui ruisselle et ce qui reluit ; Le soir il veillait très tard sous les arbres Regardant tomber lentement la nuit.
La lune en maraude au coeur des vergers Vint chercher l'enfant un soir gris d'automne : Vite, il s'envola. J'entends à jamais Le bruit de son aile amie qui frissonne.
Marc Alyn
Rencontre avec le printempsCe matin Au détour du chemin Je rencontrai le Printemps. Vêtu comme un marquis, il avait mis Des fleurs à son chapeau Des fleurs à son manteau Et même sur son dos. Les unes blanches semées de rouge D'autres mauves Et d'autres rouges et d'autres bleues. Quelle joie c'était pour mes yeux! Et je lui dis " Tu es merveilleux" Et il me regardait Et il riait, et il riait ! Et ses yeux étaient comme deux fleurs de lumière Parmi toutes ces fleurs printanières. Et il s'en fut sur le chemin En chantant quelque chansonnette. En sautant un peu sur un pied Et puis un peu sur l'autre pied, Comme font les enfants joyeux Quand ils s'entraînent à quelque jeu. Et je le vis disparaître au loin, Avec des fleurs sur son manteau Avec ses fleurs sur son chapeau. Et il a ainsi parcouru le monde Pimpant, joyeux et tout fleuri Et le monde entier lui a souri.
Dans la plaine les baladins S'éloignent au long des jardins Devant l'huis des auberges grises Par les villages sans églises Et les enfants s'en vont devant Les autres suivent en rêvant Chaque arbre fruitier se résigne Quand de très loin ils lui font signe Ils ont des poids ronds ou carrés Des tambours des cerceaux dorés L'ours et le singe animaux sages Quêtent des sous sur leur passage Guillaume Apollinaire
Mon verre est plein d'un vin trembleur comme une flamme Ecoutez la chanson lente d'un batelier Qui raconte avoir vu sous la lune sept femmes Tordre leurs cheveux verts et longs jusqu'à leurs pieds Debout chantez plus haut en dansant une ronde Que je n'entende plus le chant du batelier Et mettez près de moi toutes les filles blondes Au regard immobile aux nattes repliées Le Rh in le Rhin est ivre où les vignes se mirent Tout l'or des nuits tombe en tremblant s'y refléter La voix chante toujours à en râle-mourir Ces fées aux cheveux verts qui incantent l'été Mon verre s'est brisé comme un éclat de rire
Guillaume Apollinaire
Dans le brouillard s'en vont un paysan cagneux Et son bœuf lentement dans le brouillard d'automne Qui cache les hameaux pauvres et vergogneux Et s'en allant là-bas le paysan chantonne Une chanson d'amour et d'infidélité Qui parle d'une bague et d'un cœur que l'on brise Oh ! l'automne l'automne a fait mourir l'été Dans le brouillard s'en vont deux silhouettes grises Guillaume Apollinaire
Les sapins en bonnets pointus De longues robes revêtus Comme des astrologues Saluent leurs frères abattus Les bateaux qui sur le Rhin voguent Dans les sept arts endoctrinés Par les vieux sapins leurs aînés Qui sont de grands poètes Ils se savent prédestinés A briller plus que des planètes A briller doucement changés En étoiles et enneigés Aux Noëls bienheureuses Fêtes des sapins ensongés Aux longues branches langoureuses Les sapins beaux musiciens Chantent des noëls anciens Au vent des soirs d'automne Ou bien graves magiciens , Incantent le ciel quand il tonne Des rangées de blancs chérubins Remplacent l'hiver les sapins Et balancent leurs ailes L'été ce sont de grands rabbins Ou bien de vieilles demoiselles Guillaume Apollinaire
Cher monsieur Vous êtes un mec à la mie de pain Cette dame à le nez comme un ver solitaire Louise a oublié sa fourrure Moi je n’ai pas de fourrure et je n’ai pas froid Le Danois fume sa cigarette en consultant l’horaire Le chat noir traverse la brasserie Ces crêpes étaient exquises La fontaine coule Robe noire comme ses ongles C’est complètement impossible Voici monsieur La bague en malachite Le sol est semé de sciure Alors c’est vrai La serveuse rousse a été enlevée par un libraire Guillaume Apollinaire
L'hiver approche , les hirondelles ont fui , Mais il ne reste que les moineaux dans le pays. Bien d'autres aussi qui font leurs nids . La nature est morte , plus d'arbres en fleurs , Le temps est couleur de neige . Et n'oublions pas Noël qui lui aussi approche . Lui qui descend du ciel chaque année , Oui toi Noël qui vient nous apporter Tant de joujoux ! Noël... Noël !
Guillaume Apollinaire
Que se passe-t-il quel vacarme Quels travaux quels cris quelles larmes Ou rien La vie Un linge écru Sèche au jardin sur une corde C'est le soir Cela sent le thym Un bruit de charrette s'éteint Une guitare au loin s'accorde La la la la la - La la la La la la - La la la la la Il fait jour longtemps dans la nuit Un zeste de lune un nuage Que l'arbre salue au passage Et le coeur n'entend plus que lui Ne bouge pas C'est si fragile Si précaire si hasardeux Cet instant d'ombre pour nous deux Dans le silence de la ville La la la la - La la la la La la - La la - La la - La la Louis Aragon
Maman, quand tu es en colère,
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