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un arbre nu
Savez-vous qui est né
Le soleil a brillé,
Jason
Émond
Les poissons, les nageurs, les bateaux Transforment l'eau. L'eau est douce et ne bouge Que pour oe qui la touche. Le poisson avance Comme un doigt dans un gant, Le nageur danse lentement Et la voile respire. Mais l’eau douce bouge Pour ce qui la touche, Pour le poisson, pour le nageur, pour le bateau Qu'elle porte Et qu’elle emporte. Paul Eluard
Je fis un feu, l'azur m'ayant abandonné,
Je lui donnai ce que le jour m'avait
donné:
Je vécus au seul bruit des flammes
crépitantes,
Paul ELUARD
La pierre rebondit sur l'eau, La fumée n'y pénètre pas. L'eau, telle une peau Que nul ne peut blesser Est caressée Par l'homme et par le poisson. Claquant comme corde d'arc, Le poisson, quand l'homme l'attrape, Meurt, ne pouvant avaler Cette planète d'air et de lumière. Et l'homme sombre au fond des eaux Pour le poisson Ou pour la solitude amère De l'eau souple et toujours close. Paul Eluard
Sur mes cahiers
d’écolier
Sur mon pupitre et les
arbres
Sur le sable sur la neige
J’écris ton nom.
Sur toutes
les pages lues
Sur toutes
les pages blanches
Pierre sang
papier ou cendre
J’écris ton
nom
Sur les
images dorées
Sur les
armes des guerriers
Sur la
couronne des rois
J’écris ton
nom
Sur la
jungle et le désert
Sur les
nids sur les genêts
Sur l’écho
de mon enfance
J’écris ton
nom
Sur les
merveilles des nuits
Sur le pain
blanc des journées
Sur les
saisons fiancées
J’écris ton nom
Sur tous
mes chiffons d’azur•’
Sur l’étang
soleil moisi
Sur le lac
lune vivante
J’écris ton
nom
Sur les
champs sur l’horizon
Sur les
ailes des oiseaux
Et sur le
moulin des ombres
J’écris ton
nom
Sur chaque
bouffée d’aurore
Sur la mer
sur les bateaux
Sur la
montagne démente
J‘écris ton
nom
Sur la
mousse des nuages
Sur les
sueurs de l’orage
Sur la
pluie épaisse et fade
J‘écris ton
nom
Sur les
formes scintillantes
Sur les
cloches des couleurs
Sur la
vérité physique
J‘écris ton
nom
Sur les
sentiers éveillés
Sur les
routes déployées
Sur les
places qui débordent
J‘écris ton
nom
Sur la
lampe qui s’allume
Sur la
lampe qui s’éteint
Sur mes
maisons réunies
J’écris ton
nom
Sur le
fruit coupé en deux
Du miroir
et de ma chambre
Sur mon lit
coquille vide
J‘écris ton
nom
Sur mon
chien gourmand et tendre
Sur ses
oreilles dressées
Sur sa
patte maladroite
J’écris ton
nom
Sur le
tremplin de ma porte
Sur les
objets familiers
Sur le flot
du feu béni
J’écris ton
nom
Sur toute
chair accordée
Sur le
front de mes amis
Sur chaque
main qui se tend
J’écris ton
nom
Sur la
vitre des surprises
Sur les
lèvres attentives
Bien
au-dessus du silence
J’écris ton
nom
Sur mes
refuges détruits
Sur mes
phares écroulés
Sur les
murs de mon ennui
J’écris ton
nom
Sur
l’absence sans désirs
Sur la
solitude nue
Sur les
marches de là mort
J’écris ton
nom
Sur la
santé revenue
Sur le
risque disparu
Sur
l’espoir sans souvenir
J’écris ton
nom
Et par le
pouvoir d’un mot
Je
recommence ma vie
Je suis né
pour te connaître
Pour te
nommer
Liberté
Paul
Eluard
Je
fis un feu, l'azur m'ayant abandonné,
Je
lui donnai ce que le jour m'avait donné:
Je
vécus au seul bruit des flammes crépitantes,
La fermière et son pot de lait
Une fermière se rendait un jour au
marché.
Elle
portait en équilibre sur sa tête un plein pot de lait frais. Tout en avançant,
elle songeait à l'argent qu'elle allait gagner en vendant son lait.
«
J'achèterai des poules et elles me donneront chacune un œuf par jour. Ensuite je
vendrai tous ces œufs à la femme du pasteur. Puis, avec cet argent, je
m'offrirai une belle robe et un joli ruban gris car c'est la couleur qui me va
le mIeux. »
Elle se voyait déjà, joyeuse et fière,
cheminant gaiement pour le bal du village.
En
imaginant ces jolis habits, la fermière s'exclama:
« Je
serai si ravissante que tous les jeunes hommes du village m'inviteront à danser.
Mais je refuserai d'un signe de tête,
comme ça !
»
s'écria-t-elle.
Mais
lorsqu'elle pencha le visage, le pot de lait tomba à terre et se brisa en mille
morceaux. Tout le lait se répandit sur le sol et avec lui s'en furent les doux
rêves de la fermière.
Ainsi, il ne faut jamais vendre la peau
de l'ours avant de l'avoir tué! Esope
Le loup déguisé en agneau
Un loup
affamé rôdait toujours autour d'un troupeau d'agneaux. Mais le berger montait si
bien la garde qu'il ne pouvait guère s'en approcher. Un jour, non loin du pré,
le loup trouva une peau d'agneau que le berger avait abandonnée. Ravi de
l'aubaine, le loup l'enfila par-dessus sa fourrure et se mêla au troupeau.
Personne ne le reconnut car tout le monde croyait que c'était un mouton parmi
d'autres.
La nuit
venue, le berger, qui avait très faim, décida de sacrifier un animal pour son
souper. Il vit un mouton qui s’approchait lentement de sa cabane. Comme le
déguisement du loup était vraiment parfait, le berger le prit pour un de ses
moutons et lui assena un grand coup de gourdin. C'est ainsi que l'ingénieuse
idée du loup lui fut fatale.
Lorsqu'on joue un tour à quelqu'un, il faut prendre garde à ne pas être pris à
son propre piège.
Le chêne et les roseaux
Un
superbe chêne vivait fièrement non loin d'une rivière. Un jour, un violent orage
survint et faillit tuer net l'arbre si fort. Lorsque la tempête se calma, le
chêne, blessé, vit que les roseaux du bord de l'eau étaient encore debout.
«
Comment est-ce possible? s'écria-t-il très surpris. - C'est simple, répondit l'un d'eux, tu es bien trop orgueilleux pour plier, même un peu. Mais moi, je sais que je ne suis qu'un humble roseau. Alors, lorsque le vent me pousse, je penche la tête. Voilà pourquoi je suis encore sain et sauf. Il vaut mieux plier un peu que de céder tout à fait », conclut sagement le roseau.
La tortue et le lièvre Un
lièvre rendait souvent visite à une tortue car il aimait beaucoup se moquer
d'elle.
« C'est
là ta vitesse maximale? avait-il coutume de dire en riant. De ma vie, je n'ai
jamais vu d'aussi lent animal que toi! »
Un
jour, la tortue, agacée par ses continuelles plaisanteries, le regarda
longuement et lui dit d'une voix douce:
« Très
bien. Faisons donc une course, et nous
verrons lequel de nous deux est le plus
rapide.
»
À ces
mots, le lièvre se mit à rire à gorge déployée:
«
Une course
avec
toi? Mais je risque
d'arriver avant même que tu ne partes, ma chère!
-
C'est
ce que nous allons voir », répondit fièrement la tortue.
Et elle
s'avança sur la ligne de départ qu'ils avaient fixée. Lorsque la tortue entendit
« Partez ! » , elle commença a courIr.
Le
lièvre, qui n'était pas pressé, resta sur le bord du chemin, se disant qu'il
avait tout son temps. Il ferma les yeux, confortablement installé sur un
moelleux tas d'herbes fraîches, ferma un œil, puis les deux et... s'endormit.
La
tortue, qui savait bien qu'elle était lente, continua à courir et prit une
grande avance sur le lièvre endormi. Tant et si bien qu'elle arriva première.
« Sans
effort, les dons naturels ne suffisent pas toujours », dit-elle en souriant au
lièvre lorsqu'il arriva tout essoufflé sur la ligne d'arrivée.
Un
fermier découvrit un jour que son oie regardait étrangement l’œuf qu’elle venait
de pondre. S’approchant d’elle, il s’aperçut qu’elle avait pondu un œuf en or.
Elle
recommença le jour suivant, puis le surlendemain et ainsi plusieurs jours
d’affilée. Croyant qu’elle avait un tas d’or caché dans le ventre, il réfléchit
et pensa la chose suivante :
« Si je
la tue, tout cet or sera à moi. »
Il lui
ouvrit donc le ventre mais ne trouva rien du tout !
A
désirer davantage que ce que l’on possède déjà, on risque de tout perdre à la
fois !
A
trop crier au loup, on en voit le museau. Un enfant bâillait comme un pou tout
en gardant sont troupeau. Il décide de s’amuser.
Fables d’Esope,
Un loup, voyant un agneau qui buvait à une rivière, voulut alléguer un prétexte
spécieux pour le dévorer. C'est pourquoi, bien qu'il fût lui-même en amont, il
l'accusa de troubler l'eau et de l'empêcher de boire. L'agneau répondit qu'il ne
buvait que du bout des lèvres, et que d'ailleurs, étant à l'aval, il ne pouvait
troubler l'eau à l'amont. Le loup, ayant manqué son effet, reprit : "Mais l'an
passé tu as insulté mon père. - Je n'étais pas même né à cette époque", répondit
l'agneau. Alors le loup reprit : "Quelle que soit ta facilité à te justifier, je
ne t'en mangerai pas moins".
Cette fable montre qu'auprès des gens décidés à faire le mal la plus juste
défense reste sans effet.
Le corbeau et le fromage
Source: Ésope, fable 165
Un corbeau, ayant volé un morceau de
viande, s'était perché sur un arbre. Un renard l'aperçut, et, voulant se rendre
maître de la viande, se posta devant lui et le loua de ses proportions élégantes
et de sa beauté, ajoutant que nul n'était mieux fait que lui pour être le roi
des oiseaux, et qu'il le serait devenu sûrement, s'il avait de la voix. Le
corbeau, voulant lui montrer que la voix non plus ne lui manquait pas, lâcha la
viande et poussa de grands cris. Le renard se précipita et, saisissant le
morceau, dit: «O corbeau, si tu avais aussi du jugement, il ne te manquerait
rien pour devenir le roi des oiseaux.»
Cette fable est une leçon pour les sots.
On était en hiver et les fourmis
faisaient sécher leur grain que la pluie avait mouillé. Une cigale affamée leur
demanda de quoi manger. Mais les fourmis lui dirent : "Pourquoi n'as-tu pas, toi
aussi, amassé des provisions durant l'été ? - Je n'en ai pas eu le temps,
répondit la cigale, cet été je musiquais. - Eh bien, après la flûte de l'été, la
danse de l'hiver", conclurent les fourmis. Et elles éclatèrent de rire. Esope (VIIe-Ve
siècle avant J.-C.), Fables,
Un jour d'automne où soufflait un vent
très froid, un hanneton chargé de provisions pour l'hiver fut suivi par une
cigale.
«
Hanneton, mon bon hanneton, j'ai si faim, donne-moi un peu de cette nourriture
supplia t-elle.
- Mais
qu'as-tu fait tout l'été ? répliqua froidement le hanneton.
- J'ai
chanté, balbutia la cigale. - Eh bien, tu peux danser tout l'hiver maintenant, lui répondit le hanneton. Ne sais-tu pas qu'il faut toujours préparer aujourd'hui ce dont on aura besoin demain ? »
Esope
(VIIe-Ve siècle avant J.-C.), Fables
Traduction de Armand Eisen, Mango
Jeunesse. 1994.
Aesop
(620?-560? av. J.-C.), fabuliste grec, aurait été un esclave
affranchi à Thrace.
Le premier fablier fut celui de Demetrius Phalareus au 4e siècle av. J.-C., mais il ne survécut pas au-delà du 9e siècle ap. J.-C. Une autre collection fut celle de Phèdre, reproduite à Rome au 1e siècle ap. J.-C.
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